"J'ai choisi de vivre heureux parce que c'est bon pour la santé."

Voltaire


"Le plus fort n'est pas celui qui arrive le premier ; c'est celui qui profite le plus de ce qu'il fait."

Kilian Jornet



18 avril 2011

Canal du Midi Acte I

Lors de ce week end plus que printanier, une vingtaine de collègues de travail de mon pote Christian, a choisi de longer le Canal du Midi, entre Baziège (sud de Toulouse) et la Méditerranée. En vélo, bien évidemment.

Pour ma part, j'ai choisi de les accompagner une partie de l'aller le samedi. Je me garde le dimanche matin pour pédaler avec les djeuns du club.
Encore vibrant du samedi d'avant, je configure mon vélo en "randonneuse". Je rajoute le porte-bagage et les sacoches à l'arrière et installe la petite sacoche à l'avant, pour quelques pâtes de fruit et l'appareil photo.
7h40, je décolle de la maison, je dois retrouver toute la troupe vers 9h à la gare de Baziège.
Je coupe à travers la ville. Je tiens à préciser que les gens qui trouvent qu'il y a trop de monde le samedi, rue d'Alsace Lorraine, se lèvent certainement trop tard!

J'aime le Canal du Midi. J'ai déjà fait un article dessus (ici) mais je ne m'en lasse pas. Quelque soit la saison, je le trouve attrayant.
En cette saison, tout est vert. Les herbes le bordant sont un peu hautes, ses platanes le rendent frais. Une légère brume matinale le recouvre par endroits.
9h00 à la gare. Tout le monde est au rendez vous.
Les vélos sont déchargés des voitures et on commence à remplir le camion assistance. On fume la dernière cigarette!
A 9h30 précises, on met le cap vers la mer (comme GG).
Bonne humeur, convivialité, tout le monde a le sourire. Ça fait vraiment plaisir à voir.
Le vent est favorable, on avance bien. Tout en discutant, tout en profitant de l'air frais et néanmoins (ça fait mal le "nez en moins") pur.
A la 1ère halte, on est à quelques centaines de mètres du "partage des eaux". Rien à avoir avec Moïse et pourtant, ce qu'a fait Monsieur Riquet, même si ce n'est pas irrationnel, tient tout de même du miracle. Sans satellite, sans ordinateur, il a trouvé le point culminant entre l'Océan et la Mer, afin de dispatcher l'eau de la Montagne Noire pour qu'elle abreuve le Canal du Midi de part et d'autre. Ce Riquet, quel homme!
Peu après 11h, on retrouve Christian qui est allé en voiture à Trèbes (lieu de la pause nocturne, un peu après Carcassonne) et qui est venu en vélo à notre rencontre.
On en profite pour crever une première fois.
12h15, on est à Castelnaudary.
On avance encore un peu et on s'arrête manger.
Pique-nique, un peu de vin, un peu de gâteau au chocolat fait avec amour et amené dans une de mes sacoches, on est déjà prêt à repartir.

C'est là que j'abandonne mes compagnons de route en faisant demi-tour. J'aurais pu aller plus loin mais j'ai déjà 80km au compteur, faut penser à rentrer...

Le vent est un peu défavorable. Je quitte le bord du canal et prend la grande route. C'est certes moins bucolique, mais le bitume offre un meilleur rendement.
Je traverse Castelnaudary puis j'en profite aussi pour "gravir" un col. Bon, ok, il culmine à 189m mais ils n'avaient qu'à pas mettre de panneau, ça éviterait de tomber dedans...
A l'entrée d'Avignonet Lauragais, je bifurque vers le canal.
A partir de Port Lauragais, tout le chemin de halage est goudronné. Pas la peine de s'embêter avec les voitures, du coup.

A Villefranche de Lauragais, je rattrape un tandem. Il vient de rentrer sur la piste cyclable et roule à la même vitesse que moi. L'avantage, c'est qu'il offre un superbe abri contre le vent. Après l'avoir salué et demandé l'autorisation (même si je ne m'accroche pas à la selle), je me mets derrière. Même lorsque le pilote s'arrêtera soulager un besoin naturel, je l'attendrai. Trop bien derrière.
Le trajet du retour semblera bien moins long que tout seul.
Nos trajectoires divergent à Castanet Tolosan. De toute façon, la densité de trafic a sensiblement augmenté (entre les vélos et les rollers) et une vitesse supérieure à 30km/h n'est pas forcément sécurisante.

Un peu après Ramonville (cité chère aux Petits cahiers de Fred), je retrouve Thibaut, venu à ma rencontre.
On continue le long du canal jusqu'à Fenouillet. Arrivée faite à 16h30, le compteur indique 158km. Correct.

Voici donc ma première "longue" expérience avec des sacoches le long du Canal du Midi. Un régal.
A moi maintenant de trouver la bonne date (puisque j'ai le choix...) pour finaliser mon prochain périple: Dune du Pilat - Narbonne Plage. Un peu moins de 500km que j'ai l'intention de faire en 2 jours.
Le vélo est prêt (à mon avis, puisqu'il n'a pas cassé à Paris-Roubaix, il peut passer partout), le mental aussi alors, il n'y a plus qu'à!

Suite au prochain épisode (en juin)...


10 avril 2011

L'envers du Nord

Il fallait que je sache et l'opportunité s'est présentée.
Plus vite que pas forcément prévu (mais avec envie), j'étais engagé pour la rando "Paris-Roubaix Challenge"!


Motivé comme un cadet, même si c'est vrai qu'un cadet court pour gagner, le fait d'être au départ de ce que l'on surnomme "L'Enfer du Nord", c'est déjà fabuleux pour moi (voir article précédent).

Le poil est ras (depuis le Roc d'Azur, c'était en jachère), le matériel est prêt, je pense l'être, il fait beau (mais 6° au départ et 18 à l'arrivée, c'est un peu frais à mon goût), ça va ch...!
J'annonce déjà à qui veut l'entendre qu'il va y avoir des pavés dans les arbres et que les pavés de mai 68 volaient moins haut.
Samedi matin, le réveil sonne avant l'aube. J'ouvre les yeux. Je suis Cancellara (oui, rien que ça!).
Si certains (la plupart, visiblement) reprochent l'absence du chrono pour l'épreuve, pour ma part, ça m'arrange.
On le voit d'ailleurs dans le sas au départ: l'ambiance est détendue, certains rigolent. Je ne vois vraiment pas pourquoi ils préfèrent le stress d'un classement. On n'est vraiment pas fait pareil.
Sur la ligne, je retrouve Greg qui lui, suivra la course des pros avec l'assistance Mavic (pas mal non plus, c'est certain). Je pose pour la photo officielle.

Côté matériel et équipement, j'ai fait le choix du vélo de cyclocross (d'ailleurs, chez les pros, on en a vu pas mal également) avec des pneus tubeless (sans chambre à air, comme les voitures) et je suis persuadé que c'était le meilleur choix (je n'ai pas investi pour l'occasion, j'avais ça en "stock"!). Peu de pression = plus de confort (ou moins d'inconfort), et ça permet également de ne pas pincer la chambre à la première arrête qui dépasse un peu trop. Les dizaines (centaines?) de personnes que j'ai vues arrêtées en train de réparer, ça fait peur.
Pas de bidons non plus, ça évitera de les perdre. Je préfère le sac à dos (comme en VTT); peut être un peu gros (lui aussi...) mais avec 2l d'eau, 4 chambres à air, de quoi démonter (ou plutôt, remonter) le vélo et l'appareil photo, je suis en autonomie complète.
Des gants avec plus de gel côté paume, une autre couche de gel sous la partie haute de la guidoline et les cocottes (oui ma poule!) de frein légèrement relevées pour ne pas qu'elles m'échappent quand ça secoue.

Le premier secteur pavé n'arrive qu'au bout de 50km. Nickel. Ça permet d'échauffer le "bestiau". Toujours dans la bonne humeur, mon groupe (200 personnes environ) s'approche des-dits pavés. Il faut dire aussi que le vent n'est pas favorable (du début à la fin) et ça calme les ardeurs.
Finalement, ça frotte un peu avant le premier passage "caillouteux".
Ça freine, ça crève (déjà!), certains posent le pied, ça jure (!), je m'arrête.
L'image de Cancellara disparait au loin. Pas grave, je lui laisse un peu d'avance.

J'en profite pour éliminer un trop plein de vessie (déjà la prostate ou quoi?) et faire ma première photo:
Alors oui, effectivement, ça tape "un peu"... Et pourtant, je verrai par la suite que ce passage est "propre".

Je repars donc seul. Pas gêné du coup, je "fonce". Je fais le choix de rouler un peu plus tranquille sur les parties goudronnées mais mes cuissots contre le vent de face me permettent de sauter de groupes en groupes. Dès qu'il y a des pavés, je sens l'âme de Fabian planer au dessus de ma tête.
(j'ai du ventre sur les photos mais c'est aussi du en grande partie, aux jambières que j'ai enlevées et glissées sous mon maillot... Vilains!)

Parfois, il m'arrive de revenir sur d'autres cyclistes dans les portions "râpeuses". Il n'est pas toujours évident de doubler. Le problème, c'est que si on commence à freiner, c'est cuit. En dessous de 30km/h, on a l'impression de faire du marteau piqueur. Et pour relancer, pas question de se mettre debout sur les pédales.
En musique (à fond), ce supporter belge est déjà en place pour le lendemain. J'adore.
Évidemment, à chaque arrêt, je perd du terrain sur Spartacus que je ne reverrai qu'à la télé le lendemain.

Les kilomètres et les pavés défilent. Passé le cap des 100km (sur 140), les pavés semblent de plus en plus hauts...
Je passe également moins vite alors ça "tabasse" davantage. Un rayon de la roue arrière m'abandonne. L'avantage des étriers de frein de cyclocross, c'est qu'ils sont très écartés de la jante. Même voilée d'un centimètre, elle ne touche pas aux patins. Comme si j'avais besoin de ça!
A la sortie des deux derniers "chahutages", j'ai un peu de mal à desserrer les mains. Pendant l'heure qui suivra l'arrivée, je sentirai quelques engourdissements dans les petits doigts. Dommage pour mes narines pleines de poussière...
Dans les derniers secteurs pavés, je pense au Suisse qui roulait sur un coussin d'air l'année dernière. Quel homme!

Et puis, à force de persévérance, on arrive enfin au bout du (des) chemin(s).

Dans le dernier tronçon de ce périple athlétique, je reviens sur un groupe de coureurs tout de vert vêtus. Parmi eux, je reconnais le fameux Sean Kelly (+ de 190 victoires chez les pros dont, entre autres, 2 Paris-Roubaix!).
Pour autant, de cette fantastique expérience, je retiendrai plusieurs choses.
Tout d'abord, une bonne condition physique est primordiale et la puissance fait la différence.
En 27 ans de vélo, c'est la première fois qu'être lourd ne m'a pas trop désavantagé! En effet, plus on est lourd, moins on rebondit.
Oui, le terrain est un chantier sans nom mais le fait de le faire en rando permet de vraiment apprécier le parcours. En fait, je compare ça à une étape de montagne: Si on le fait à son rythme, c'est parfait. Si on subit, c'est un calvaire. Un enfer.

Un (double) regret quand même: ne pas avoir parcouru la Tranchée d'Arenberg et ne pas être arrivé jusqu'au vélodrome. Presque frustrant.

Aujourd'hui au réveil, quelques douleurs au niveau du cou et dans mes triceps de danseuse étoile, me disent que je ne suis pas forcément doué pour faire ça en course mais je sais que désormais, quelque soit la route (ou le chemin), mon vélo est capable de passer partout (ou presque). Je le considère comme indestructible!

Ce dimanche, mon héros helvète était encore le plus fort même s'il ne termine "que" deuxième. Esseulé, comme la semaine passée au Tour des Flandres, il a couru "enfer" et contre tous.
Finalement j'ai vécu la course devant la télé (moins d'ambiance que sur place c'est évident, mais au moins, j'ai tout vu!). Encore plus imprégné que jamais par les effort fournis.

Maintenant, j'ai vu, j'ai vécu, je sais. Je ne serai jamais Cancellara.

PS: avec la loi qui passe ces jours-ci, elle ne ferait pas la fière, ma roue voilée dans un lieu public...
Ok, je sors.


01 avril 2011

Roubaix, le pari...

Ira, n'ira pas?

Depuis quelques temps, j'avais dans l'idée de participer à la cyclosportive "Paris-Roubaix Challenge" (celle-ci devant emprunter les 140 derniers kilomètres de ce monument du cyclisme). Pour autant, rien n'était encore sûr mais là, c'est décidé, j'y vais!

Il y a quelques jours, l'organisateur (A.S.O. qui organise, entre autres, le Tour de France) annonçait à son grand regret, que l'épreuve ne serait pas chronométrée et serait assimilée à une randonnée cyclotouriste.
Évidemment, une grosse déception s'était faite sentir chez un grand nombre d'inscrits. Pour ma part, je dois vous avouer que j'aime autant que ça se passe comme ça. Mes dernières courses ayant laissé le mauvais souvenir d'une horde de "champions du monde potentiels" qui ne juraient que par le fait de vouloir étoffer leur palmarès par des xièmes places à la course du village d'à côté.
Personnellement, n'ayant que l'envie de m'amuser, quelque soit le résultat obtenu, il était évident qu'on ne courait pas avec le même objectif.
Alors tant mieux, qu'ils restent chez eux, ça m'évitera de me faire insulter lorsque je m'arrêterai prendre des photos!

Et effectivement, je remettrai un dossard pour l'occasion. Chose à relativiser puisqu'il n'y aura pas de chronomètre. En fait, ça me servira surtout à retrouver mon sac avant la douche!

Au plus loin que ma mémoire me le permette, je me souviens de "l'anecdote" concernant Bernard Hinault en 1981. Avant le départ, il avait dit que ce n'était pas une course car trop dangereuse, et après son arrivée victorieuse à Roubaix, il confirmait le fait qu'il ne reviendrait jamais.

Toutefois, ma véritable histoire d'amour avec Paris-Roubaix commence le 12 avril 1992.
Ce dimanche là, je n'ai pas de course prévue. Je pars donc rouler, seul, avec au programme, une longue sortie. Fait exceptionnel (ça n'a du arriver que 2 fois), je pars avec une petite radio et une oreillette. Vers 15h, je l'allume. Paris-Roubaix en direct. Il reste 50km et Gilbert Duclos-Lassale vient de sortir du groupe de tête. Seul. Pour ceux que le matos intéresse, il possède une fourche téléscopique Rock Shox sur son vélo! Une première.

De mon côté, je suis à près de 40km de chez moi, du côté de L'Isle Jourdain. S'entame alors un long contre-la-montre pour nous deux. Lui, doit arriver à Roubaix avant Olaf Ludwig parti à sa poursuite et moi, je me jure d'arriver devant la télé avant son entrée sur le vélodrome.
Lorsque j'allume la télé, il reste à peine plus d'un kilomètre. J'ai "gagné". C'est à son tour...
Je suis debout face à ma télé noir et blanc en formica marron. Il rentre sur le vélodrome et j'en ai la chair de poule. Je pense que c'est une des premières fois où j'écrase une larme devant une course de vélo (à la télé...).
Les tribunes du vélodrome s'enflamment, tout le monde est debout et scande "Duclos! Duclos!". Un truc énorme.

Voir le résumé de la course en cliquant ici

Malheureusement pour moi, la rando de la semaine prochaine s'arrêtera au Carrefour de l'Arbre (et son célèbre bar/restaurant qui à l'époque, n'était ouvert que ce jour là!) et je n'irai pas jusqu'au vélodrome. Tant pis.
Je vais quand même tenter de profiter de cette journée au maximum pour me faire plein de souvenirs (et des photos).
Je sais déjà que ce sera dur. Très dur. Certainement plus dur d'ailleurs, que ce que je peux imaginer.

Dès lors, je vivrais encore plus intensément chaque année, la retransmission de cette épreuve mythique, surnommée l'Enfer du Nord.
Et puis, dès le lendemain, quand Fabian Cancellara passera au Carrefour de l'Arbre, il aura une pensée pour moi. A moins que ce ne soit le contraire, la veille.

La route qui mène en Enfer, est pavée de bonnes intentions. Pas celle-là.

PS: on est le 1er avril mais ce n'est pas un poisson...