Vous l'avez sans doute lu récemment par ici, David Moncoutié s'est lancé un défi : rallier Paris à Malaga, 2330km, en 10 jours...
Évidemment, on peut crier "Au dingue !" mais en fait, le dingue c'est lequel ? Celui qui fait les choses ou celui qui le suit ?
Dans ce cas de figure, pas de jaloux (comme les pieds. Oui, les "pièges à loup", c'est connu), tout le monde est un "peu" dingue.
Et dans cette aventure, il a embarqué Abdel et Vincent, connus sur Tour de Fête, Gilles, le pote d'Abdel, et Bruno, un collègue de Gilles.
Dans ce périple, je n'ai participé "qu'à" la 4ème étape, celle reliant le Larzac aux Pyrénées Orientales. 262km et 3200m de D+ au programme.
Nous nous retrouvons donc à la Gare aux Ânes, près de la Couvertoirade (Aveyron), le samedi soir.
La troupe en est à son 3ème jour depuis Paris et les garçons sont déjà marqués. Des genoux grincent, des cous coincent. La journée s'est d'ailleurs finie par une séparation du groupe, les plus usés ayant profité d'un T.E.R. entre Saint Chély (Lozère) et Millau. Un peu de repos, c'est bien aussi si on veut profiter correctement des choses.
Âne et tête mule...
On s'élance à 9h40. Pas forcément tôt mais les jeunes (ben si, quand même...) sont arrivés tard, avec les gilets fluo et l'éclairage.
Bruno, dans le dur, profitera de la voiture pour se reposer la journée (et du coup, passer par la plage avec les filles). Pour l'occasion, les sacoches des vélos iront dans le coffre de la voiture. C'est toujours ça de gagné.
Au bout de 7km, on passe à la Couvertoirade. Répertorié parmi les "Plus beaux villages de France", ça vaut bien un détour de quelques hectomètres.
Il y a une dizaine d'années, j'étais passé ici lors d'une rando VTT et, "pressé", je n'avais pas pris le temps de tester un nouveau "councept". Un peu comme si Paris-Roubaix se résumait aux tours de piste mais avec des pavés !
A l'origine, il s'agit d'une lavogne. Une cuvette pavée servant à recueillir l'eau et où viennent boire les troupeaux de brebis, celles-là même dont le lait sert à faire le Roquefort. Gilles, Abdel et moi faisons alors notre baptême. On s'amuse comme on peut.
L'heure tourne et nous finissons par partir pour de vrai. Le plateau du Larzac est vraiment magnifique (c'est là que j'ai commencé le VTT en 1990 alors que je faisais mon service militaire). Lorsque nous surplombons les profondes vallées environnantes, on se rend alors compte que le schuss vers la plaine biterroise va être sympathique.
Et c'est le cas. La longue descente vers Lunas est rapide. Il est évident qu'il vaut mieux la descendre au départ que la remonter à l'arrivée.
Peu de virages et un bel enrobé, la gravité me fait prendre la tête du groupe. C'est dans ces moments que je me rends compte que j'étais un gros rouleur et que je suis devenu un rouleur gros...
A Lunas, un des signaleurs d'une rando cyclo, pensant que nous sommes inscrits à l'épreuve, nous fait signe de nous arrêter au ravito.
Ni une, ni deux, on fait pause/pose. Et là, surprise, on y retrouve Christel Ferrier-Bruneau, avec qui j'avais fait connaissance à Pékin lorsqu'elle courait avec Maryline. Elle était venue en voisine.
Contrepèterie sur la destination finale...
On repart et on continue à descendre dans une vallée où la température s'élève plus vite qu'on ne descend. En tout cas, pédaler sous le soleil, ça fait du bien.
Le vent n'est pas vraiment favorable. Vincent met en route. C'est un grand gabarit, dur au mal. On prend la plupart des relais ensemble. Les siens font parfois mal et la fougue de sa jeunesse (28 ans) doit être raisonnée de temps à autre. Il est vraiment très fort. Quand on sait qu'il n'a jamais fait de course ni pris de licence, il est peut être passé à côté de "quelque chose". En même temps, il est là, prend du plaisir et c'est sans doute ça le plus important.
Je ne peux pas rouler, j'en ai un devant...
Après quelques longues lignes droites où j'ai plus vu le c.. de Vincent que lui n'a vu le mien, nous arrivons à Narbonne. On rejoint les filles et Bruno, à la sortie de Bages, pour la pause pique-nique. Salade de riz, gâteau de semoule, chips et Haribo, il n'y a que ça de vrai.
On ne s'attarde pas trop quand même car nous n'en sommes qu'à la moitié...
Entre Bages et Peyriac-de-Mer, j'ai une pensée pour Jean-Denis qui habite ce joli coin mais qui cette semaine, est parti rouler dans les Pyrénées. Tant pis pour lui, on en profite quand même.
A la sortie de Peyriac, on oblique sur la droite pour rentrer un peu plus dans les terres. On s'enfonce dans la campagne et prenons la direction du Col de Souil puis Opoul. Je fais le GPM (jusque là, je n'avais fait que les sprints à l'entrée des villages...) devant Vincent. David cherche une excuse.
Je fais le GPM suivant en vieux renard. Vincent monte vite et je me cale comme je peux dans sa roue, à l'abri du vent contraire. J'attends seulement les derniers mètres pour passer. Ça pique d'autant que tant que le sommet n'est pas franchi, Vincent ne se relève jamais. Il est joueur mais moi aussi.
Un peu perchés sur les hauteurs, on aperçoit la Méditerranée au loin.
On redescend alors sur Rivesaltes. Malgré le fait qu'on soit dimanche après midi, quelques commerces sont ouverts. Ou rouges.
Après avoir fait le plein (merci Abdel !), on repart. Toulouges, Canohès, Trouillas, ça permet d'éviter Perpignan.
A la sortie de Trouillas, la route s'élève. On s'attaque alors au Col de Llauro. Une bonne dizaine de kilomètres dont le pourcentage augmente tout au long de l'ascension. Je prends quelques longueurs et Vincent me rejoint. On roule ensemble jusqu'en haut. On ne dispute pas le GPM qu'il méritait, de toute façon.
Abdel, David et Gilles arrivent peu de temps après et on bascule vers Céret. 7km assez rapides sur un beau goudron comme on aimerait en voir plus souvent.
Sur le pont de Céret, on fait une dernière pause photo. Le soleil se couche. Nous, pas encore.
De Céret, il reste 33km vers Prats de Mollo. Mais 33km de grimpette. Vallée gentille au début mais dont la pente augmente au fur et à mesure.
La nuit est là. On sort les gilets et les lampes.
Véro tente de m'appeler, mon mobile s'éteint. Plus de batterie. 10h de Strava et de Live Track (suivi en direct de ma position), ça consomme. Mon GPS m'a lâché depuis 5km et j'ai le même constat : 10h de guidage, c'est le maximum.
Véro, nous devançant, est allée à l'hôtel-restaurant prévenir du retard et négocier des pâtes malgré l'heure tardive. Elle redescend en voiture et se met derrière nous les 5 derniers kilomètres. On s'accroche un peu le temps de discuter, ça soulage.
David m'a fait comprendre plusieurs fois dans la journée qu'il se réservait pour le panneau final.
A ce moment là, perdu dans le noir, je ne sais plus trop où on en est dans l'ascension. Sans compteur, c'est difficile. Je me laisse glisser jusqu'à la voiture pour demander (sans oreillettes, on fait à "l'ancienne"...)... 2km !
Si le village s'étend un peu, le panneau de Prats se trouve à 1km à peine.
Dans le sillage de Vincent (quelle machine !), je suis à fond mais tant pis, c'est presque l'arrivée. Pour autant, je sais que je n'aurai droit qu'à une tentative.
Dans la lumière des phares, il me semble apercevoir le panneau de sortie du village, de l'autre côté de la route. Direct, je flingue. Effet de surprise, je prends quelques mètres à David. Il n'y a que 100m mais les cuisses brûlent. Avec un 1/4 de roue d'avance, je fais le panneau. Pas besoin de photo finish et d'ailleurs, le flash nous aurait ébloui.
On finit cette étape sur le plus petit développement. Il est 22h15 lorsque l'on se retrouve tous devant l'hôtel/restaurant. Une douche, une bière, des pâtes et déjà, il est l'heure des "au-revoir", des "merci", des "bonne route", des "soyez-forts", etc...
Nous revenons alors sur Toulouse et nous éteindrons la lampe de chevet à 3h du matin... Belle journée !
Aujourd'hui, nous sommes jeudi. Les garçons viennent d'arriver en Andalousie. Jusque là, les routes ont été longues et chaudes. Bruno aura finalement fait le (bon) choix, de louer une voiture pour faire l'assistance dans la seconde partie du périple.
Demain, 180km au programme et 150 samedi. Repos dimanche et retour en avion lundi.
Quoiqu'il en soit, bravo les gars ! Et merci !
Je n'ai pas continué avec eux et pour autant, je n'ai pas de regrets. Bien sûr, j'ai passé une formidable journée mais certainement parce que j'en ai bien profité. La fatigue était là le lendemain (même encore un peu...) mais je n'ai pas été obligé de repartir pour 250km.
Quelque part, ce voyage de plus de 2300km avait quand même un air de "compét" puisqu'il fallait absolument rejoindre Malaga en 10 jours. Il y avait une contrainte de temps et ça, ça me gênait un peu.
Dans ma vision de la rando cycliste, il y a une trop grande part de plaisir indispensable dont je ne peux me passer. Je continue de penser que 150km est un maximum quotidien si on veut repartir "frais et dispo" le lendemain matin.
En partant à 8h le matin, en roulant 6h maximum, ça laisse une belle partie de la journée pour une sieste, un tour dans la localité où l'on dort, une bière à l'apéro et une vraie nuit complète de sommeil.
Ce qui est sûr, c'est quand je rentre d'une sortie comme celle là, il me tarde déjà de savoir quand je pourrais rouler à nouveau. Si j'avais fait ces 10 jours non-stop, il y a fort à parier que bon (ou mauvais) nombre de jours serait passé avant que je ne remette mes fesses (certainement meurtries) sur une selle.
Et comme je le répétais souvent aux jeunes que j'entraînais, il faut créer l'envie. Et pour ça, il faut toujours s'arrêter avant de dépasser la limite.
En attendant peut être un tour de Corse en 2016, avec des étapes permettant de goûter autant à la plage qu'à la charcuterie locale, je vais organiser, pour celles et ceux que ça tente, une jolie boucle de 200km courant juillet, dans notre belle région Midi-Pyrénées. A suivre...